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dimanche 31 octobre 2010

Écrire en français (8)

« Je suis l'homme qui vit entre deux cultures, deux sensibilités, je suis l'homme qui a ses racines en Roumanie et ses ailes en France. » (Matéi Visniec)





« C'est une langue que j'ai réussi donc à approfondir assez pour écrire mon théâtre, mais pas assez peut-être, puisque ce n'est pas ma langue maternelle, pour continuer à écrire des poèmes en français, mais pour le théâtre, ça va, ça marche, c'est bon. (...) J'étais créateur de langue en roumain. (...) En français, j'ai été obligé d'être pauvre. » 
(Matéi Visniec, extrait de l'entretien mené par Philippe Touzet et enregistré au Conservatoire du Grand Avignon le 11 juillet 2009, source: http://www.lebilletdesauteursdetheatre.com/index.php?entretiens2&id=24)

Poème (1)

LA GRANDE COMPLAINTE DE MON OBSCURITÉ UN

froid tourbillon zigzag de sang
je suis sans âme cascade sans amis et sans talents seigneur
je ne reçois pas régulièrement les lettres de ma mère qui doivent passer par la russie par la norvège et par l'angleterre
les souvenirs en spirales rouges brûlent le cerveau sur les marches de l'amphithéâtre
et comme une réclame lumineuse de mon âme malheur jailli de la sphère
tour de lumière la roue féconde des fourmis bleues
nimbe sécheresse suraiguë des douleurs
 
viens près de moi que la prière ne te gêne pas elle descend dans la terre comme les scaphandres qu'on inventera
alors l'obscurité de fer en vin et sel changera
simplicité paratonnerre de nos plantes prenez garde
les paratonnerres qui se groupent en araignée
ainsi je deviens la couronne d'un christ énorme
pays sans forme arc voltaïque
 
les aigles de neige viendront nourrir le rocher
où l'argile profonde changera en lait
et le lait troublera la nuit les chaînes sonneront
la pluie composera des chaînes
lourdes
formera dans l'espace des roues des rayons
le sceptre au milieu parmi les branches
les vieux journaux les tapisseries
un paralytique
nimbe sécheresse
roue féconde des fourmis bleues
seigneur doigt d'or fourneau sphingerie
pourquoi l'étrangler pourquoi
après le coup de foudre la marche militaire éclatera
mon désespoir tube en fer d'étain mais pourquoi
pourquoi alors?
ainsi ainsi toujours mais le chemin
tu dois être ma pluie mon circuit ma pharmacie nu
mai plânge nu mai plânge veux-tu

(Tristan Tzara, "La grande complainte de mon obscurité un, in VINGT-CINQ POÈMES, achevé d'imprimer en 1918 chez J. Heuberger pour la Collection Dada, Zurich, Zeltweg 83 avec dix bois gravés de Hans Arp - écrits entre 1915 et 1918. Source: http://www.mouvementdanette.be/dada/textes/tzara/25poemes/complainte1.htm)

(Auto)portrait (10)

« Le 31 mars 1916, je quitte ma mère en larmes… et je viens en Suisse, à Leysin. Je ne connais pas la langue que pour demander du pain et produire l’hilarité; je prends Télémaque et un dictionnaire et je commence à déchiffrer. C’est ainsi que j’ai appris le français, il y a trois ans et demi […]. J’ai lu une bonne partie des classiques français et 15 volumes de votre œuvre. » (Panaït Istrati - 1884-1935, lettre à Romain Rolland)
(Source: Joëlle Kuntz, "Panaït Istrati, l’homme qui n’adhère à rien", disponible sur: http://81.27.130.64/Page/Uuid/ecd276f2-de1c-11df-9b0b-e47316d37edf|0)

Itinéraire bilingue (2)

« Peindre c'est la vie, la vraie vie, ma vie. » (Victor Brauner)


samedi 23 octobre 2010

Parutions (5)

Liliana Lazar, Terre des affranchis, Gaia, 2009.



« C’est une langue rebelle, exigeante, qui prend son temps. Elle n’a pas besoin d’être efficace, elle ne sera jamais la langue des affaires. » (Liliana Lazar)

dimanche 17 octobre 2010

À l'orée des citations (7)

« Je lisais et parlais deux langues. J'écrivais l'une de gauche à droite et l'autre de droite à gauche, le roumain avec assurance, l'hébreu avec hésitation. Chacune me donnait accès à un monde différent. La première à la vie ordinaire, la réalité concrète. La seconde au monde imaginaire. Ce qui a dû creuser un écart plus profond entre les deux que si j'avais pensé et rêvé dans une seule langue. Mais j'aime à croire qu'il en faudrait deux à chaque enfant : l'une pour le monde d'ici et la seconde pour le monde autre. » (Serge Moscovici, Chronique des années égarées, Paris, Éditions Stock, 1997, p. 53)

Parutions (4)

 Violaine Houdart-Merot (sous la dir. de), Écritures babéliennes, Peter Lang, 2006.

Conférence (1)