« J'ai commencé à obtenir un résultat intéressant lorsque j'ai entrepris de "malinkiser'' le français, d'adopter des tournures particulières, archaïques, permettant de mieux traduire la façon d'agir et de penser des Africains. » - Ahmadou Kourouma (2000)
« Lorsque j'écrivais Les Soleils des indépendances, je vivais encore en Côte d'Ivoire, en pays malinké. Je parlais et je pensais dans ma langue natale. Je participais aux palabres. En Afrique, le discours joue un rôle essentiel. Dans les palabres africaines, c'est celui qui arrive avec le meilleur proverbe qui a raison. Quelle que soit la réalité des faits. Tant que j'ai essayé de rendre compte de cette forme de discours en français classique, le roman, les personnages ne sortaient pas. J'ai commencé à obtenir un résultat intéressant lorsque j'ai entrepris de "malinkiser'' le français, d'adopter des tournures particulières, archaïques, permettant de mieux traduire la façon d'agir et de penser des Africains. Par exemple, je commence le livre par cette phrase : "Il y avait une semaine qu'avait fini dans la capitale Koné Ibrahima. " Si je dis "avait fini" et non "était décédé" ou "était mort", c'est pour reprendre le concept malinké selon lequel les morts ne disparaissent pas : on finit une vie pour en recommencer une autre, différente. Mon travail sur la langue est l'aboutissement de toute une recherche sociologique, d'une imprégnation dans la culture et la langue de mon pays. » (Entretien avec Ahmadou Kourouma, propos recueillis par Aliette Armel, Le Magazine littéraire, no. 390, septembre 2000)
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